Grandeur et décadence

Vous l’avez sans doute remarqué… Ces derniers jours, j’étais dans ma région natale : Grenoble. Mon dernier article parle de l’appartement de mes grands-parents, que je n’avais pas vu depuis 1969. L’appartement, hein, pas mes grands-parents… Il est également un autre souvenir que je voulais partager avec mes (très) aimables lecteurs : celui du pavillon Keller.

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L’incroyable Pavillon Keller

Pour aller aux Deux Alpes, il faut emprunter une route sinueuse qui part de Grenoble, traverse la vallée de la Romanche, passe non loin de Bourg d’Oisan avant d’atteindre les pistes enneigées. Quand nous étions en vacances de neige – c’est ainsi que l’on surnommait cette période -, sitôt descendu du train qui nous amenait de Paris, nous – ma mère, mon frère et moi – filions vers la gare routière pour prendre le car qui nous amenait aux Deux-Alpes. Les grandes fenêtres, la taille du véhicule et sa vitesse assez lente, contribuaient à redécouvrir un paysage dont je ne me suis jamais lassé, notamment la traversée de la vallée de la Romanche. Au début du 20ème siècle, elle est devenue un pôle insudtriel essentiel au développement de la houille blanche. On parle ici de l’utilisation de l’énergie produite par les chutes d’eau. Bref, de puissance hydraulique. Bref, d’électricité.

Quand on évoque Rome, on pense à César. Quand on est à Livet-et-Gavet, on parle de Charles Albert Keller, ingénieur des Arts et Métiers né en 1874.

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Charles Albert Keller
C’est lui qui va façonner la vallée de la Romanche, la développer pour en faire un pôle moderne et industriel. Notamment pendant la 1ère guerre mondiale : l’endroit devint stratégique car toutes les entreprises du nord et de l’est avaient été détruites. En plus d’être efficace, l’homme est social. Il fait construire des logements pour son personnel, des commerces et même une mutuelle. Et comme pour mieux asseoir son autorité suprême, Keller ordonne la construction du pavillon qui portera son nom.

J’ai vu cette incroyable demeure à toutes les vacances de Noël et de Février. Chaque fois, ce côté glauque de maison dortoir, cet état délabré n’ont jamais manqué de me fasciner. Comme le seront d’ailleurs Matthieu Kassovitz pour le film Les Rivières Pourpres ou Alessandro Perissinotto pour son roman Une petite histoire sordidechoisiront la maison comme décor de leurs histoires.

L’imposante bâtisse a été construite en deux parties.

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Keller choisit d’abord la pierre comme matériau pour sa maison. En 1912, le premier pan fut terminé et servit à héberger, en plus de son propriétaire qui logeait au dernier étage – ce qui, d’ailleurs, se voit aux vitraux qui décorent ce dernier – le personnel de direction de l’entreprise. Une répartition hiérarchique ordonnée par les étages, du plus haut au plus bas, selon les échelons de la société Keller et Leleux,

Plus tard, Charles Keller choisit le béton pour terminer la deuxième phase du pavillon : des pilotis au dessus de la Romanche. Au dessus de cet ouvrage, l’industriel inaugure son « bureau promontoire », dominant et surveillant ses ateliers et usines. Terminée, le pavillon Keller a plus de 1700 m2 de surperficie.

Aujourd’hui, la route de l’Oisans ne passe plus par le centre de ce village désormais dortoir. Il faut s’arrêter pour photographier cette ancienne forteresse du pouvoir. Garer sa voiture, marcher dans les ruelles désertes de Livay-et-Gavet. Découvrir l’abandon et la solitude de ce qui fut autrefois un bourg prospère et lumineux.

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Nous traversons le village, fascinés par l’état de vétusté des maisons. Détail léger : maman pointera du doigt l’ancienne école de Livay, dont la façade, privilège des bâtiments administratifs, est toujours impeccable.

– » C’est la petite école de papa… » dit-elle en souriant.

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L’école de Livay où le père d’Anne-Marie usera ses fonds de culotte. Techniquement, mon grand-père. J’expliquerai un jour…
Un habitant, que nous croiserons, nous racontera qu’il n’a eu aucun problème à faire financer son projet d’achat de maison par le banquier.

« – Pour un montant pareil, dira ce dernier, j’ai l’habitude de financer des monospaces. »

Tout est dit.

I love you. All of you. and Lulu.

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6 réflexions sur “Grandeur et décadence

  1. Bonjour Monsieur,
    Je réalise des tableaux de ski ou de sport automobile, et je recherche des décors plus ou moins connus. Comme je passe souvent près de cette célèbre maison pour aller à l’Alpe d’huez, je voudrais savoir si je peux utiliser une de vos photos comme base d’un de ces décors.
    Bien cordialement.
    Cyril Rocca

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    1. Bonjour, Cyril. Pardon pour cette réponse si tardive. Je n’étais pas du tout sur mon blog ces derniers mois. Bien sûr, vous pouvez utiliser ma photo. A condition de respecter les crédits. Peut être voulez vous un fichier Hd s’il n’est pas trop tard ? Encore pardon. Cordialement.

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  2. Bonjour,
    Pour info et comme vous semblez bien connaître pour avoir simplement traversé le village, Livet s’écrit bien Livet et non Livay.
    Pour ma part, j’y ai grandi donc je connais plutôt bien 😉

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